Les 5 étapes pour améliorer l’annonce d’une mauvaise nouvelle

choc de l'annonce

Le choc de l’annonce

Le moment de l’annonce de quelque chose de grave est toujours un moment délicat et difficile pour les patients comme pour les soignants. Nombre de professionnels sont en difficulté lorsqu’ils se retrouvent dans la position d’annoncer quelque chose, ou de reformuler une annonce qui vient d’être faite.
Dans cet article je vais vous donner les clefs pour mieux vivre ce temps d’annonce. Retrouver les 6 étapes essentielles pour bien mener une l’annonce.

L’annonce est toujours un moment sensible ou des émotions fortes surviennent et peuvent mettre en difficulté le praticien ou le soignant. Que ce soit pendant un examen comme un scanner, une échographie, des résultats de prise de sang, ou lors d’une consultation ou d’une hospitalisation, les situations d’annonce sont fréquentes et toujours complexes.
Nous allons voir comment l’instauration d’étape permet d’avoir des repères non seulement pour le patient mais surtout pour les soignants qui mènent l’annonce.

Il n’existe pas de bonne façon de faire des annonces, mais il en existe certainement de très mauvaises.

Les étapes que nous allons voir ici permettent d’apporter la structure pour mener une annonce.
Sachez que la psyché humaine fonctionne de la même façon que le corps. C’est à dire que devant un danger imminent, il va anticiper la réaction pour minimiser au maximum les souffrances qui peuvent en découler. Par exemple lorsque que vous vous faites un croche-patte et que vous allez tomber, instinctivement, vous allez mettre les mains en avant pour vous protéger au maximum. Et bien dans l’annonce du mauvaise nouvelle c’est pareil, SAUF QUE C’EST VOUS soignant qui devez mettre en place les balises qui vont permettre à l’autre d’enclencher son mécanisme de protection. Si vous le faites sans mettre des balises, c’est comme si vous poussiez le patient avec les mains attachées dans le dos. La réception sera traumatisante et douloureuse.
Vous allez découvrir ces balises indispensables pour permettre à la psyché du patient de sortir les amortisseurs.

étape numéro 1

Le cadre :

La première étape est de créer un cadre autour de l’annonce. Le cadre est sécurisant. Depuis la plus tendre enfance, nous avons besoin d’un cadre défini pour pouvoir évoluer de manière sécurisée et en confiance. Le cadre est contenant et permet à l’autre de se sentir en sécurité.
Une annonce ne se fait pas dans un couloir, dans une pièce où l’on risque d’être dérangé à tout moment. Il faut savoir créer les conditions nécessaires pour être entièrement disponible à l’autre.
Si c’est dans le cadre d’une consultation ou d’une échographie car le RDV pris est justement un RDV qui doit aboutir à une annonce, il faudra porter une attention particulière aux conditions de déroulement de cette consultation.
Le cadre est contenant et il est une aide précieuse pour vous qui aller annoncer une mauvaise nouvelle, ne le négligez pas.
Si vous avez besoin de silence pour réfléchir, dites-le pour que ce silence ne soit pas mal interprété. Expliquez comment vous fonctionnez pour que votre non-verbal ne soit pas une source d’angoisse.
Pendant une annonce, il y a une hypersensibilité et une hyper-interprétation du non-verbal. Cela peut mettre le soignant en situation compliquée, d’où l’intérêt de poser le cadre.

étape numéro 2

Le but de cette rencontre :

De quoi va t’on parler aujourd’hui ? Pourquoi prenons-nous ce temps ? Qu’est-ce que l’on vient vérifier à l’examen ?
Toutes ces questions sont essentielles pour vous. Elles vous permettent d’introduire votre consultation en signifiant à l’autre, les raisons de sa présence ici et de votre rencontre.
Cette étape commence à être délicate pour l’annonceur car vous devez, VOUS DEVEZ, commencer à prononcer certains mots sur : ce que vous avez vu, ce que vous avez découvert, les questions que vous vous posez.
Il est important de poser vos INCERTITUDES à ce moment là. Ce sont l’énonciation de vos incertitudes qui vont allumer dans le cerveau de l’autre les premiers warnings nécessaires pour la mise en place des amortisseurs.
Ceci est valable pour tout type d’annonce, pédiatrique, adulte, au cours d’un examen comme une radiologie ou une interprétation de scanner.

étape numéro 3

Décrire les éléments concrets observés :

Alors cette étape est l’étape cruciale pour amorcer l’annonce de la mauvaise nouvelle. Trop souvent c’est à ce moment là que les soignants amorcent un rétropédalage, et adopte une position de fuite. C’est une étape délicate car elle nécessite de poser les mots de ce qui se passe, et cela peut faire peur au soignant de les dire.
Dans un soucis de préserver ou de ménager l’autre, c’est la phase où vous utilisez des métaphores, des mots cachés et où les faits ne sont pas simplement décris. Cela entraine une confusion qui met le soignant dans une position compliquée car il doit « jongler » pour ne pas dire vraiment.
Hors, « dire » est ce qui permet à l’autre de continuer à sortir ses amortisseurs.
C’est à cette étape que la plupart des soignants restent bloqués.

Etape numéro 4

Voilà ce que je devrai voir ….

Cette étape vient compléter la précédente. Après avoir observé ce que vous voyez, vous allez maintenant passer à l’étape de la description de ce que vous devriez voir. Des exemples :
Pour une échographie fœtale : Je vois son cœur à l’échographie, il est plus gros que d’habitude. Les vaisseaux qui sortent du cœur ne semblent pas être positionnés là où ils le devraient. Ce que je devrais voir, c’est un gros vaisseau, l’aorte, sortant du ventricule gauche, et un autre, double, les artères pulmonaires, sortant du ventricule droit. Hors, l’aorte semble sortir du ventricule droit et les artères pulmonaires du ventricule gauche.
Pour un scanner : Je vois vos poumons sur ces images, je vois également la trachée et les bronches. Je vois qu’il y a une zone foncée au milieu du poumon. Je devrais voir plutôt quelque chose de clair, identique au reste du poumon. Cela peut me faire penser à une masse.
Alors bien sûr ces exemples sont des exemples simples, mais l’idée est d’utiliser des mots simples pour décrire les éléments concrets que vous avez devant les yeux, sans commencer à utiliser des termes techniques ou des supposions médicales sur ce que vous observez.

étape numéro 5

Je ne vois pas :

Cette dernière étape vous permet de poser ce que vous ne voyez pas. Après avoir expliquer ce que vous devriez observer, vous allez maintenant poser tout ce que vous ne voyez pas : Les battements cardiaques, le rein, le vaisseau, le canal, l’artère etc, etc…
Cette étape est très importante car elle est l’introduction à la question qui amène l’annonce :
  • Est-ce qu’il est mort ?
  • Est-ce que c’est un cancer ?
  • Est-ce que je vais mourir ?
Le patient peut très bien vous posez des question directes, comme il peut aussi ne pas vous les poser et vous dire : Et alors ?
C’est alors là qu’intervient l’annonce de la malformation, de la mort, de la suspicion de cancer etc.
La question est qui prononce le mot en premier ? Eux ou vous ? Là pas de règle, MAIS, il faut que le mot soit prononcé, c’est indispensable pour le processus psychique qui va se mettre en place juste après. Tant que le mot n’est pas dit, l’autre peut se laisser aller à la pensée magique (Si j’évite l’évènement, je vais éviter la peine). Au moment où vous prononcez le ou les mots, il n’y a plus de marche arrière possible.
Tant qu’il y a de la métaphore, il y a de l’espace à l’interprétation à la pensée magique.
Sachez que vous ne maîtrisez pas la réaction à ce moment-là. Vous pouvez vous retrouver face à quelque chose de complètement illogique car la sidération entraine une altération du processus logique.
Deux réactions sont possibles :
  • Le patient comprend et tire la conclusion tout seul.
  • Le patient ne comprend pas et veut faire quelque chose pour changer ce que vous voyez ou ce que vous annoncez.

Le résultat est que de toute façon, l’autre se retrouve par terre.
Quoi que vous fassiez, quoi qu’il arrive, l’autre va se retrouver par terre. Rien ne viendra atténuer cela mais cette étape est indispensable pour intégrer la réalité. 
C’est pour cela que c’est très important d’être honnête, simple et progressif. La seule chose que vous devez faire, c’est de respecter ces étapes qui permettent à l’autre de mettre en place ses amortisseurs pour que la chute soit moins brutale.
Lorsque vous êtes infirmiers ou aide-soignants et que vous ne faites pas d’annonce, sachez que vous pouvez suivre ces étapes pour n’importe quelle information qui s’avère difficile pour l’autre. Si le médecin a déjà formulé l’annonce, vous pouvez vous permettre de reprendre ces étapes en faisant reformuler ce que le patient ou la famille a entendu. A l’étape 2 vous demandez : Qu’est-ce que vous avez compris de ce que vous a annoncé le médecin ? Le gynécologue ? la sage-femme ? etc….

TRÈS IMPORTANT :

Lors d’une annonce difficile, le choc psychique va entrainer une altération de la compréhension des informations. Beaucoup de choses qui seront dites ne seront pas retenues ou entendues.
De plus, les processus logique sous situation de stress sont altérés, ce qui amène l’autre à reposer des questions ou à répondre de manière complétement inadapté.
Dans ce cas, ce n’est pas parce que l’annonce n’a pas été faite ou a été mal faite, c’est simplement qu’il faut reprendre, reprendre, et expliquer parfois plusieurs fois, avec les mêmes mots et comme si c’était la première fois, la même chose. Jusqu’à ce que la personne puisse entendre les informations.
Il existe une certitude sur le moment où l’information va être intégrée. Au cours d’un parcours de soin il y a plusieurs annonces et vous ne maîtrisez pas à quel moment et à quelle annonce l’autre va réagir ou intégrer l’information. Il vous faut rester humble et penser que ce n’est pas forcément à l’annonce que vous avez prévue que le patient va intégrer l’information. Parfois ce n’est pas la première, ni la deuxième mais la troisième. Parfois ce n’est pas celle du médecin mais le moment où l’infirmière reformule qui va permettre à l’autre d’intégrer la nouvelle.
La première annonce n’est qu’un maillon d’une grande chaîne et il y a des choses qui vont se régler dans les autres maillons. 
Enfin je vous inviterai à vous repositionner dans le rôle d’annonceur. C’est important pour vous. Au lieu de dire « je suis désolé… », dites plutôt « je suis désolé de vous annoncer que … ». Vous n’êtes pas responsables de ce que vous annoncez. Vous êtes responsable de l’information que vous délivrez, pas plus.
Voilà un article simple qui vous offrent des outils concrets pour votre pratique. 🙂
PS : En complément je vous invite à découvrir l’article sur les attitudes d’écoute. Ces attitudes vous aident à trouver la juste posture d’écoute durant votre entretien. Découvrir ici

Source :

Inspiré d’une intervention de Mr FOHN Bruno, psychologue clinicien et spécialiste du Deuil.

1 Comment

  • Lescot Gisèle

    Très bien décrit, merci pour ces mots…. Secrétaire médicale, après l’annonce, je me retrouve souvent en seconde ligne, j’observe, les réactions sont différentes selon les personnes et selon par qui l’annonce a été faite. Mon rôle est difficile à ce moment là car je dois souvent prendre des rendez vous chez des médecins, pour des examens plus approfondis et là, il faut être efficace car devant le patient, il ne faut pas avoir l’air en difficulté, j’ai souvent l’impression que si j’obtiens rapidement des réponses à mes requêtes, il repart un peu mieux…. Mettre un nom sur un visage est important après l’annonce….

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