Il est là, allongé sur son lit, une jambe en moins. Il ne peut pas se lever, juste tourner dans son lit à la force de ses bras.
Cela fait 2 ans qu’il apprend à avoir besoin des autres pour pouvoir s’occuper de son intimité. Comme un enfant qui a besoin de sa mère, il est sans cesse obliger d’appeler lorsqu’il n’est pas dans son environnement habituel.
Il est à l’hôpital depuis 2 jours. Il a du mal à respirer et il a cru mourir. Il est donc arrivé aux urgences où ils ont découverts deux grosses masses dont une qui comprimait sa bronche. Voilà pourquoi l’air ne passait plus … Le crabe présent dans sa jambe il y a deux ans est venu se loger dans ses poumons. Tapi sous un rocher, attendant la bonne vague pour sortir et attraper sa proie, il était planqué là depuis le début.
Quel combat vain. Perdre une jambe pour rien. Si au moins le crabe était resté dans la jambe. Mais il a dû sauter durant l’opération et le chirurgien ne l’a pas vu. C’est malin ces petites bêtes.
Quand je rentre, il est désolé. Désolé de m’offrir en spectacle son urinal sur sa table, à côté de son sac à main, de son portable, de son orange et de sa bouteille d’eau. C’est avec des trémolos dans la voix qu’il se demande comment il en est arrivé là. Sa dignité en prend un coup. Voir cette urine enfermée dans ce bocal, posé sur la table où il mange, ça le dégoûte. Ce qui le dégoute le plus en fait, c’est de ne plus pouvoir maitriser l’image qu’il donne de lui. Tout le monde peut voir qu’il a pissé et qu’il attend que quelqu’un vienne débarrasser ce qui ressemble à une énorme chope de bière.
Il s’excuse encore et encore et se demande comment les hôpitaux ne sont pas plus sensibles que ça à ces détails. Comment les soignants valides et autonomes ne se rendent pas compte que CE détail est LE détail qui le fait le plus souffrir.
Mais comment lui dire, que pris dans la tourmente hospitalière et l’habitude, un urinal plein d’urines est pour un soignant la même chose qu’une chope posée sur un bar. Comment lui faire comprendre que c’est de l’ordre de la normalité et que parfois ça ne dérange plus personne de voir des urines près des affaires personnelles. C’est un quotidien … rien de plus qu’un quotidien.
L’homme a cette capacité à s’habituer à tout, surtout quand c’est insupportable. Un rempart de protection pour continuer d’avancer.
Allez, je me ressers, vous m’en remettez une deuxième pour la route …
Cynthia
Défi N°2, article 1/30
4 Comments
Bonjour Cylie,
Merci pour cette fiche et pour les autres, c’est très émouvant…
Merci à toi de partager tout ça !
La communication libère c’est certain, elle apaise, elle dissout les barrière.
ça me fait penser aux livres de Lise Bourbeau sur la Guérison des blessures de l’âme.
J’en ai fait un résumé sur mon blog 😉
Bonne continuation à toi,
Damien
Ondes et Santé.com
Merci de ton petit mot Damien….
Il n’y a pas de mots…. percutant…
Un 1er janvier, il n’est pas bon d’être à l’hôpital, je rentre dans cette chambre pour visiter mon amoureux, Mon choc!!! Un urinal plein sur chaque adaptable, c’est une chambre à 2 lits, les draps sont plein de sang et malgré lepassage d’un ide et de 2 aides soignantes venus 3 fois durant ma visite rien ne change, je repars triste, pas de colère, il était ravi de la gentillesse et de la disponibilité du personnel !!! Il n’a pas pu se laver les dents car venu par les urgences il n’avait pas d’affaires de toilette, il n’y a plus de brosses à dents et il avait une barbe de 3 jours !!! Finalement j’étais triste et choquée, mon œil d’aide soignante sans doute !!! Mais il était gai et souriant !!! Vite qu’il rentre chez lui !!!!