Le burn out est répandu dans nos professions de soin, mais aussi dans l’enseignement, dans le social, dans la justice. Dans toutes ces professions qui prennent soin des humains, qui les aident et les accompagnent. Je vous propose d’en parler mais aussi de tenter de décaler son regard sur ce burn out.
Et si faire faire un burn-out était une chance ?! Si l’épuisement professionnel était une porte vers un autre possible ?
Aujourd’hui le burn-out soignant est la maladie professionnelle la plus « populaire ». Dans une étude de juin 2018 menée par des organismes indépendants, j’ai pu découvrir que 24% des salariés Français sont en situation d’hyperstress, considérée comme dangereuse pour leur santé. C’est dans le secteur de la santé (42% des actifs), du spectacle (31%) et des services (29%) que les salariés se disent le plus hyperstressés. (Cabinet Stimulus, 2017)
18% des salariés affirment avoir été victimes d’un burn-out (syndrome d’épuisement professionnel). 22% en ont été témoins dans leur entreprise. (Viavoice/Harmonie Mutuelle, 2017). 12% des dirigeants d’entreprise et 21% des indépendants sont passés par la case burn-out. (Viavoice/Harmonie Mutuelle, 2017)
Mais comment changer notre regard sur ce qu’on l’on identifie comme la bête à abattre ou la maladie à prévenir ? Et si ce burn out était un allié plutôt qu’un ennemi. Sans nier la souffrance qui lui est associée, si ce burn-out était porteur de sens ?
ET SI CE BURN-OUT ÉTAIT EN FAIT UN CADEAU DE VOTRE CORPS ?
Je ne vais pas revenir sur les grands messages de prévention, d’identification ou de compréhension du burn out. Si vous tapez ce mot dans votre barre de recherche, vous tomberez immédiatement sur des dizaines d’articles qui pourront vous éclairer mieux que moi.
Je viens vous apporter un autre regard sur ce syndrome d’épuisement professionnel.
Ceux qui l’ont vécu peuvent vous dire pour la majorité qu’ils n’ont rien vu venir. Ils décrivent ce sentiment qu’un jour ils se réveillent au pied du mur, et que là c’est la douche froide. Ils réalisent qu’ils sont tombés très bas et que surtout ils n’ont pas le souvenir d’avoir vécu la chute.
Votre psyché est super bien faite. Ce que je veux dire par là, c’est qu’elle va nous permettre de mettre en place tout un tas de stratégies qui ont pour unique but de vous permettre de poursuivre votre mission dans votre boulot. Un peu comme un mode radar qui vous garantirait la survie.
Le terme de burn-out a été employé pour la première fois en 1974 par le psychiatre américain Herbert Freudenberger dans un article, Staff burnout. Il l’a défini alors comme une « brûlure interne ».
Est- ce que vous avez déjà réalisé que burn-out littéralement ça voulait dire « brûler de l’intérieur, se consumer ». « C’est une usure à petit feu qui trouve sa source dans le cadre professionnel ». Catherine Vasey
La première chose à réaliser :
Catherine Vasey, psychologue et auteure de Burn-out : le détecter et le prévenir (Editions Jouvence), nous explique dans son livre « Contrairement à ce que l’on pense souvent, la première cause d’un burn-out n’est pas psychologique, mais physiologique. Il est dû à un stress important et répété. Le stress est une réaction du corps, qui lui permet de se mettre en alerte le temps d’un danger. Le problème, c’est qu’aujourd’hui, l’urgence est devenu un mode de vie. Les gens sont sur le qui-vive 24 heures sur 24. Résultat : leur corps est épuisé. Et cette fatigue de fond va avoir un impact sur leur moral ».
De cet épuisement physiologique va naitre l’épuisement physique et émotionnel.
Et si notre corps nous parlait ?
Nous pensons aujourd’hui de plus en plus que le corps et l’esprit sont intimement liés. Comme la menthe et le citron du mojito, l’un ne va pas sans l’autre.
Mais alors si votre corps finissait par vous envoyer des signaux là où vous, vous ne vouliez pas voir la souffrance que vous êtes en train de vivre ?
Ce burn-out serait alors la résultante d’une alliance entre votre corps et votre psyché pour vous alerter d’un danger.
Imaginer que ce message soit l’occasion pour vous de partir ? De repartir ? Reconstruire, changer, inventer, créer. Combien de projets sont nés suite à un burn out ? Combien de décisions qui ont radicalement changé le cours d’une vie sont survenues après un burn-out ? Et si ce syndrome était en fait une incroyable opportunité ?
CE QUE LE BURN-OUT VEUT ME DIRE
Vous vous jetez à corps perdus dans votre boulot. Toujours disponible, vous revenez sur vos repos, vous donnez de vous-même, vous n’arrêtez pas d’être ici et là pour que le patient soit le mieux possible. Vous vivez des choses difficiles dans vos relations professionnelles, vous supportez des situations qui vous révoltent, vous taisez des comportements qui sont limites acceptables. Vous ne dites pas ce dont vous avez besoin pour travailler, vous ne posez pas vos limites. Pire peut-être vous ne vous mettez jamais en colère.
Votre processus de burn-out s’enclenche avant même que vous en ayez conscience.
Lorsque vous réalisez que vous êtes épuisés, au bout de vos ressources, il est déjà trop tard.
Le pire c’est que vient s’immiscer à ce moment là des croyances limitantes !
Je vous invite à découvrir cette vidéo sur les croyances limitantes !
Qu’est-ce qu’elles vous murmurent ces croyances ? :
C’est partout pareil.
Pourquoi je changerai de service ce sera pareil ailleurs.
C’est l’hôpital qui est comme ça, ça ne changera pas.
Le cadre me déteste.
Je suis contractuelle je ne peux rien dire.
Les autres ne me comprennent pas.
Elles vont vous permettre de rester en place un peu plus longtemps. Le temps de vous sentir complètement piégé et d’avoir la conviction que vous ne pouvez plus rien faire à part : Péter les plombs ! Et partir en burn-out.
La seule issue d’urgence avant le suicide est alors l’arrêt maladie.
Cet arrêt maladie symbolise alors le changement, la pause, le mouvement que vous auriez du opérer de manière consciente lors des premiers signes.
Parce qu’en fait la seule chose à faire à ce moment là est de prendre soin de vous en respectant vos limites et vos défauts. En admettant l’imparfait et l’inconstant. En arrêtant de courir après un idéal et une perfection.
L’IDEAL :
Parce que oui le burn-out touche ceux qui souhaitent changer les choses, qui souhaitent faire évoluer les pratiques, qui se battent pour que les patients aient une meilleure prise en soins, qui luttent pour un hôpital plus humain. Il touche ceux qui ne comptent pas leurs heures et reviennent sur leur repos. C’est eux qui sont en premières lignes pour le burn out soignant.
La quête de reconnaissance de votre investissement, votre dévouement à votre métier ou à votre structure fait de vous de parfaite victime. Et les soignants sont les proies idéales avec leur métier dit de VOCATION ! Leur mission de service public, au service de la santé de leurs concitoyens.
Plus vous donnez sans limites (ce qui est une grave erreur de respect de soi-même) plus vous attendez de la reconnaissance et moins vous en avez. Vous passez aux yeux de vos supérieurs pour un excellent employé dans l’équipe à qui on peut tout demander. C’est tout. Aucune reconnaissance supplémentaire. Celle du patient finit par ne plus suffire.
Sur les réseaux sociaux les témoignages de soutien et de reconnaissance des soignants sont partagés par millions? Pourquoi à votre avis ?
LE SENS :
C’est la deuxième raison qui vous précipite dans les abîmes du burn-out. Travailler sans sens. Ne pas savoir pourquoi vous faites ça et où vous allez. Lorsque vous devenez des machines à exécuter les soins, des machines à enseigner, des machines à écouter… Vous n’avez aucun temps de concertation en équipe, vous ne prenez jamais la parole pour dire que vous ne comprenez pas telle ou telle décision, vous ne proposez pas de faire autrement. Vous acceptez de faire des choses qui n’ont pas de sens pour vous. PIRE ! Vous acceptez de faire des soins pour lesquels vous n’êtes pas d’accord. Mais vous ne dites rien.
Pour Catherine Vasey, nos conditions de travail actuelles favorisent la multiplication des cas de burn-out. « Dans notre société, l’hyperactivité est survalorisée. Dès lors, les gens ne sont pas évalués sur les bons critères. On leur demande de faire mille choses à la fois, d’aller le plus vite possible, et avec les nouveaux moyens de communication, de toujours répondre dans les cinq minutes. On les surcharge de travail et d’informations -dont la plupart ne les concernent pas- à gérer. Tout en faisant fi de leur désir d’exécuter un travail de qualité ».
Or, être un professionnel qui s’exprime, qui affirme avec objectivité et argumentation son avis, sa position et ses valeurs n’a jamais été quelque chose de délétère.
REPÉRER LES TÂCHES SOURCES DE STRESS :
Un téléphone qui sonne toutes les deux minutes, une interruption permanente de tâches vous empêchant d’avancer, une tâche récurrente qui n’a aucun sens « Ce sont des tâches, des situations ou des personnes qui créent chez vous un sentiment d’impuissance, de lourdeur, de fatigue. Qui vous vident de votre énergie ». Catherine Vasey
Il faut tout de suite les faire changer, surtout ne pas continuer à les subir sans rien dire. Il faut les dénoncer, et SURTOUT proposer des axes pour améliorer ou faire changer les choses.
MAIS ATTENTION :
« certains lieux d’usure, certaines conditions de travail, sont impossibles à faire évoluer. Au lieu de perdre son énergie à tenter de casser un mur, on doit les accepter car on ne peut précisément rien y faire. ».
Et ça il faut l’accepter !
Donc au final si malgré vos efforts, vos actions, vous identifiez en permanence la récurrence des situations, comportements, problèmes, ou pire que l’on vous menace pour vous faire taire, alors c’est qu’il faut prendre vos jambes à votre cou. Il faut partir car c’est une structure malveillante qui est basée sur une absence de professionnalisme.
Partir n’est pas abandonner ou échouer, parfois partir c’est se préserver pour mieux avancer.
Cynthia
Les soignants et leur foutue culpabilité n’arrivent pas à voir un départ comme autre chose qu’un abandon.
Je ne saute pas du navire pendant qu’il est en train de couler. Je pense à mes collègues qui restent et qui n’ont pas le choix de partir. Croyance limitante, nous avons tous le choix.
Votre service existait avant vous et il continuera après vous. Si vous rajoutez en plus une autre croyance limitante : je sais ce que je laisse mais je ne sais pas ce que je trouve. Alors vous ne faites plus rien dans la vie !
Le mouvement attire le mouvement. Dès que vous allez bouger il y a pleins de choses, de rencontres qui vont suivre. Le mouvement permet la découverte, la rencontre, le nouveau, l’espoir. C’est le médicament le plus puissant dans le traitement de la prévention du burn-out et particulièrement celui du burn out soignant.
LA CLEF POUR LE PREVENIR :
Prendre soin de soi. Je ne vous le répéterai jamais assez ! Personne ne le fera pour vous. Ce blog est d’ailleurs créé pour vous donner le maximum de ressources pour prendre soin de vous. Vous n’avez qu’à vous servir ! Allez voir un peu par ici, sur la page d’accueil il y a trois grandes ressources très complètes à télécharger !
Prenez des pauses, respirez. Acceptez de laisser du travail à l’équipe d’après si votre vacation est trop chargée. Ça ne leur plaît pas ce n’est pas grave. Vous avez besoin de travailler à un rythme normal, humain. Vous avez besoin de prendre de l’énergie pour en donner aux autres. Offrez-vous un moment pour prendre conscience de votre respiration, du moment que vous vivez. Autorisez-vous à aller aux toilettes ! A boire, à manger.
L’objectif final de toutes ces petites attentions envers soi-même ? « Ne plus terminer une journée de travail en étant complètement épuisé, au point de ne plus pouvoir s’investir dans sa vie privée. Il n’est pas juste de sacrifier toute son énergie au travail ».
Catherine Vasey écrit : « Au quotidien, il est bon d’interroger la distance que l’on a avec son travail : prend-il trop d’importance ? »
Sachez que l’arrivée de cette fatigue de fond est annonciatrice de votre burn-out.
« Lorsque cette fatigue de fond ne passe pas avec les vacances et que l’accumulation de tensions et de stress reprend sitôt le retour au travail ».
Et bien c’est que vous êtes en burn-out. Il est urgent d’agir !
Le burn-out peut faire de gros dégâts. Certains peuvent mettre des années en s’en remettre. C’est un sujet sérieux.
Mais sachez que vous pouvez le prévenir comme vous en remettre.
Comprenez aussi que c’est un épisode incroyable à l’intérieur duquel vous pouvez vous demandez ce que vous allez faire de votre vie. Est-ce que c’est votre place ? Votre métier ? Est-ce que c’est cela que vous voulez faire. Certains soignant après un burn-out repartent dans leur métier de soins, mais autrement. Ils travaillent différemment, se positionnent, ont un autre regard sur leur métier. Ils ont une posture professionnelle beaucoup plus réfléchie. Ils prennent de la distance avec leur métier. Le burn-out leur a appris à prendre du recul.
Personne n’est à l’abri. En vivre et en traverser un ce n’est pas grave mais c’est à prendre au sérieux. Mais sublimer un burn-out n’est pas une proposition souvent donnée. Pourtant c’est le seul moyen que votre corps a trouvé pour vous sauver la vie. Remerciez-le, écoutez le message et mettez-vous en action. Vous en ressortirez plus fort, plus grand, plus beau, et surtout plus en phase avec vous-même.
Aimez-vous.
Respectez-vous.
Ecoutez-vous.
Affirmez-vous.
Cynthia M
7 Comments
Merci pour cet article précieux ! Je crois moi aussi que le burn out est une chance. Une chance de se créer (enfin?) une vie plus alignée avec SOI, ses valeurs, ses talents. En tout cas c’est le message que je cherche à diffuser sur mon blog PartageTonBurnOut.fr
J’ai diffusé ton article sur ma page Facebook pour le diffuser à mes lecteurs !
Bonjour Astrid,
Merci de ton retour. J’aime beaucoup l’espoir que tu diffuse sur ton site. Je pense que tes articles permettent de changer le regard que l’on porte sur les choses négatives et ça c’est ce en quoi je crois.
Bises
Un très bel article que j’ai partagé parce que intéressant et que je pense que c’est utile pour tous les soignants.
J’entends souvent dans mon service et les services que j’ai fait, des collègues qui ne veulent pas laisser du travail à la relève et donc ils débauchent tard et qui sortent fatigués ou en pleurs, de peur de se faire juger ou critiquer par les collègues . Et qui n’acceptent pas non plus que le collègue d’avant leur laisse du boulot et ce sans savoir le pourquoi . Les mêmes collègues qui reviennent sur leurs repos, vacances et qui disent fatigués et qui râlent parce que leurs repos sont annulés etc…et quand on leur dit de ne pas revenir si cela les dérange nous répond : oui mais il y a le patient derrière… on leur dit que ce n’est pas grave, c’est le principe même du travail d’équipe . Mais c’est dur…
ce sont les mêmes personnes qui donnent la définition du bon soignant, c’est à dire être un bon soignant c’est revenir sur son jour de repos et débaucher tard. On est dans le principe de recherche éternelle de reconnaissance ….Malheureusement, c’est encore difficile pour certains d’entre nous de dire NON. Il faut apprendre et oser dire NON pour prendre soin de nous , personne d’autre le fera à notre place.
Merci pour ton retour. Je partage entièrement ton point de vue ???? apprenons à dire NON ! C’est la meilleure façon de nous respecter.
Merci cylie pour ce beau travail de nouveau.
Il est important de s’écouter, de ne pas se fondre dans l’ambiance délétère dans laquelle on nous fait vivre quelques fois. L’important c’est que notre travail, la façon de prendre en soin le patient corresponde à notre point de vue, notre éthique, sinon nôtre âme est trop coupée. Prendre de la distance avec ce que peut dire le collègue. Qui a raison ? Quel est le point de vue le meilleur ?
Il faut une grande confiance en soi pour pouvoir affronter le regard et la pensée du collegue qui a une vision opposée à la tienne.
Sincèrement
Chantal.
J’ai été soigné pour un burnt out il y a 3 ans, jamais je n’aurais cru en faire un.
Cela a été aussi un nouveau départ.
Merci d’évoquer ce sujet.
Belle journée.
Claire
Merci Cylie pour cet article très utile ! Le burn-out est la maladie des temps modernes. C’est aussi un allié comme tu le dis très bien pour nous alerter qu’on est allé trop loin !